jeudi 29 août 2013

Que peut et doit faire Israël lorsque reprendront les négociations ? - par Michel GURFINKIEL

Michel GURFINKIEL
 
Que peut et doit faire Israël, lorsque reprendront - nécessairement - les négociations, pour ne pas retomber dans les pièges de naguère ? Jouer cartes sur table. A Oslo, les experts israéliens de l'Ecole B (1) avaient décidé de remettre les problèmes passant pour essentiels - l'Etat palestinien en Cisjordanie et à Gaza, les implantations israéliennes, les réfugiés, Jérusalem - à la fin d'un processus de plusieurs années. 

Cette démarche, nous l'avons dit, ne manquait pas de sagesse. Des peuples qui ont appris à coexister ne regardent pas les choses de la même façon que ceux qui s'affrontent. Mais les Palestiniens, ou plutôt ceux qui qui s'étaient arrogé un pouvoir absolu sur ce peuple, ne tenaient nullement à coexister avec Israël avant d'avoir résolu, à leur manière, ces questions. Dans un nouveau processus de paix, il faudra donc mettre l'essentiel au commencement - first things first.

Israël, en particulier, devra faire de la reconnaissance pleine, entière et intangible de son existence - et de son droit sur la terre d'Israël - le préalable à tout règlement. 

Le juriste américain Douglas Feith, désigné en 2001 au poste d'Undersecretary of Defense (ministre adjoint de la Défense) auprès de Donald Rumsfeld, a publié à ce sujet, dès 1993, une analyse qui retient l'attention : A Mandate for Israël

Selon lui, la question a été tranchée dès 1920 et 1922, quand il a plu aux "principales puissances alliées" de la Première guerre mondiale, maîtresses absolues des territoires du Moyen-Orient abandonnés par la Turquie, de créer sous le nom de Palestine une entité destine à devenir un "Foyer national juif". Le texte constitutif de cette entité - le Mandat confié à l'une des puissances, la Grande-Bretagne, sous les auspices de la SDN (2) - est tout à fait explicite à ce sujet, en particulier dans ses articles 2, 4, 6, 7 et 11. 

Feith estime que cette décision aurait été valide même si elle avait été arbitraire ou injuste, tout comme le sont, en Europe, les frontières imposées par les vainqueurs de 1918 et de 1945, ou, en Afrique, celles qui ont été tracées par les colonisateurs. 

Mais il observe qu'elle reposait bel et bien sur des considérations morales (3) : la nécessité de résoudre les problèmes humanitaires de plus en plus pressants que rencontrait le peuple juif (et que la Shoah, une dizaine d'années plus tard, allait si tragiquement illustrer) ; la simple équité (3) puisque les Arabes bénéficiaient de dispositions du même ordre dans d'autres territoires conquis sur les Turcs, plus étendus et plus peuplés. 

Feith ajoute que le Mandat de 1922 a été "accompli" à travers la création de l'Etat d'Israël dans une partie du territoire alloué, mais qu'il reste virtuellement en vigueur dans le reste du territoire, c'est-à-dire en Cisjordanie et à Gaza, tant que l'Etat israélien n'en aura pas disposé autrement, en particulier à travers un traité de paix librement consenti avec telle ou telle autre puissance, Jordanie, Egypte ou même Etat de Palestine.


Tiré de : Michel GURFINKIEL : La Cuisson du Homard. Réflexion intempestive sur la nouvelle guerre d'Israël, Editions Michalon, 2001, pp. 143-144




(1) "L'Ecole A estime qu'il faut prendre acte de l'absence de paix réelle et sortir de la logique de concessions et d'accommodements qui a prévalu jusqu'ici. Une seconde école, l'Ecole B, affirme au contraire qu'il n'y a pas d'alternative . Sans paix à moyen terme, quels qu'aient été ses succès jusqu'ici, et quelle que soit sa supériorité qualitative actuelle, Israël est condamné" (p. 29)
(2) Société des Nations

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